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05/04/2024
Danièle Faugeras
Blog PO&PSY

Abbas Kiarostami, poète, peintre, photographe et réalisateur

« Être à la fois cinéaste, photographe, poète… Tout ça, ce sont des motivations pour vivre, pour faire chaque jour quelque chose, que ce soit du cinéma, de la photo ou de la poésie. Ce n’est pas un choix, c’est une fatalité. »

 

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« Si derrière tout réalisateur européen on peut voir un peintre, derrière un réalisateur persan, on trouve un poète ou même un conteur. La poésie représente pour nous l’essence de l’art traditionnel. »

 

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« Kiarostami cherche à re-lire la réalité à partir d’une table rase qui rendrait de nouveau du sens au monde et de la confiance en celui-ci. »

            Hamid Dabashi,

enseigne la littérature persane à l'université de Columbia (E.U.)

 

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Une œuvre tendue vers le retrait et l'épure.

 

Une œuvre où l’auteur tendrait à soustraire pour mieux montrer, à s’abstraire de la contrainte de la narration pour inventer une forme de cinéma abstrait en résonance de plus en plus grande avec la nature qu’il a tout au long de son œuvre associée au sacré.

 

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« Il m’arrive de penser : comment faire un film où je ne dirais rien ? Si des images peuvent donner une telle force à l’autre pour les interpréter et tirer un sens que je ne soupçonnais pas, alors il vaut mieux ne rien dire et laisser le spectateur [le lecteur] tout imaginer. Quand on raconte une histoire, on ne raconte qu’une histoire et chaque spectateur [chaque lecteur], avec sa propre capacité d’imagination, entend une histoire. Mais quand on ne dit rien, c’est comme si on disait une multitude de choses. Le pouvoir passe au spectateur. André Gide disait que l’importance est dans le regard et non dans le sujet. Et Godard dit que ce qui est sur l’écran est déjà mort. C’est le regard du spectateur qui lui insuffle la vie.»

Abbas Kiarostami

in Dérives, Conversation avec Jean-Luc Nancy

 

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« En montrant trop on ne montre plus rien, c’est pourquoi le spectateur est démuni en quittant la salle. On s’est habitué à comprendre en interrogeant. Dès qu’on s’interroge, on a l’impression de ne pas avoir compris. Alors qu’on peut reconnaître au son, on peut apprécier à travers une ombre. À travers une fenêtre, nous pouvons deviner la vie d’une famille. Notre seule force est d’avoir cette fenêtre. Tout spectateur (lecteur) dispose du même imaginaire. Nous devons croire à l’intelligence du spectateur (du lecteur), qui peut découvrir par lui-même. (…) L’imagination peut aider à voir, à avoir une vision plus ouverte. Ainsi chacun peut avoir une vision différente de celle de l’autre. Par des signes, je peux créer une image pour chaque spectateur (lecteur) : « Devine ! Je te montre des signes, à toi de deviner le reste. » C’est quoi ? C’est le respect que le spectateur (le lecteur) se doit quand il se rappelle combien il peut imaginer, combien il peut apprécier à travers son imaginaire. »

 

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" Une image ne représente pas, ne se donne pas en représentation mais annonce sa présence, invite le spectateur (le lecteur) à la découvrir."

 

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La révolution kiarostamienne aurait consisté à réinstaller le regard à la place de la représentation à laquelle le cinéma de l’Occident s’est consacré presque depuis le début de son histoire : substitution imputable à un caractère spécifique du rapport de l’Orient à l’image, attaché à celle-ci comme présence et non comme reproduction.

J.-L. Nancy

in Webzine n° 134 – "Abbas Kiarostami, le cinéma à l’épreuve du réel"

 

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Je crois que le véritable art doit être éternel. Dans un pays comme l’Iran, où les questions sociales et politiques changent constamment, l’artiste doit voir au-delà de ces dénouements mondains ; il doit se consacrer sur des réalités plus fondamentales comme l’humanité même, qui est plus universelle.

 

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Un artiste conçoit et crée une œuvre dans l’espoir de matérialiser une pensée, un concept ou une émotion à travers un médium. La crédibilité de grands poètes perses comme Rumi et Hafez vient très précisément du fait qu’ils ont composé de façon à ce que, quels que soient l’époque, le lieu et les circonstances où l’on lit leurs poèmes (…), leurs poèmes soient neufs et chargés de sens.

Abbas Kiarostami,

entretien avec Shahin Parhami, 14/06/2004

 

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«  Kiarostami cherche à re-lire la réalité à partir d’une table rase qui rendrait de nouveau du sens au monde et de la confiance en celui-ci. »

            Hamid Dabashi,

enseigne la littérature persane à l'université de Columbia (E.U.)

 

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L'incompréhension fait partie de la poésie

 

 

« Pourquoi la lecture d’un poème excite-t-elle notre imagination et nous invite-t-elle à participer à son achèvement ? Les poèmes sont sans doute créés pour atteindre une unité malgré leur inachèvement. Quand mon imagination s’y mêle, le poème devient le mien. Le poème ne raconte jamais une histoire, il donne une série d’images. Si j’ai une représentation de ces images dans ma mémoire, si j’en possède les codes, je peux accéder à son mystère. L’incompréhension fait partie de l’essence de la poésie. »

Abbas Kiarostami