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07/02/2023
Michel JEZEQUEL

Pour une action sociale réellement émancipatrice

Dans cet ouvrage Jean Louis LAVILLE et Anne SALMON évoquent les conditions de développement d’un travail social dont l’objectif est l’émancipation des personnes.

Nulle question ici donc d’une quelconque approche « social business » dans lequel le rapport à l’autre serait de l’ordre du consumérisme ou de l’ayant droit, approche individualiste fortement valorisée en action sociale aujourd’hui. 

L’action sociale telle que nous la connaissons en France est bien née au début du 20ème siècle de la mobilisation citoyenne faisant émerger dans la sphère publique des questions sociales sans réponse. À titre d’exemple ; 

  • Ce sont les parents d’enfants handicapés qui s’organiseront pour développer des dispositifs à destination de ceux que l’on appelait alors les « inéducables ». 

  • Ce sont des magistrats qui se mobilisent pour des services d’accompagnement de mineurs en danger, donnant naissance aux Sauvegardes de l’enfance et de l’adolescence…. 

Cette construction de l’action sociale sera conduite par des citoyens engagés qui utiliseront les statuts de l’économie sociale et particulièrement le statut associatif pour agir. 

Cependant l’action sociale ne s’est pas inscrite dans les mouvements associationistes et/ou de l’économie solidaire et de leurs pratiques. Elle s’est inscrite d’abord dans une logique de service public et de plus en plus actuellement dans une logique de marché. 

Jean Louis LAVILLE et Anne SALMON éclairent ici les approches théoriques qui ont entretenu ce développement porté par BOURDIEU, CROZIER, FRIEDBERG. Nous sommes invités à nous en éloigner pour compléter notre corpus des approches de DEWEY, HABERMAS, HONNETH, afin de construire une action sociale qui fasse avec les personnes et non pas pour, une action sociale réellement émancipatrice. 

De fait, ces propos décapants, à contre-courant des politiques publiques d’action sociale aujourd’hui, viennent interroger les formations initiales en travail social et ouvrent des perspectives de cursus de formation à rénover. 

Verrons-nous en France des « Organisateurs communautaires » comme en Californie dans les années 70 ? 

L’ouvrage éclaire également sur les outils et méthodes d’organisation pour faire avec les personnes. Il promeut l’approche collective en opposition à l’approche individuelle actuelle, valorisée par « le déluge psychiatrique » et la crainte d’organisations « communautaires ». 

Cet ouvrage est une bulle d’oxygène qui permet de donner du sens à l’action pour les praticiens que nous sommes. Il comporte sans nul doute les ressorts d’une action sociale attractive car plus humaine, moins bureaucratique et managérialiste. 

 

Michel JEZEQUEL, Président Cress Bretagne (Chambre Régionale de l'Économie Sociale et Solidaire)