Décès de Jean-Claude Benoit


 

Hommage à Jean-Claude Benoit (1928-2018)

 

S’il a créé la collection « Relations » qu’il a dirigée activement au sein des éditions érès, Jean-Claude Benoit était avant tout un praticien. Il a été un des psychiatres qui s'est efforcé, dès la fin de son clinicat dans les années 1960, par une volonté constante et à travers des techniques relationnelles innovantes, de réinventer ce qu'était la psychiatrie de l'époque, marquée par un mélange de barbarie médicamenteuse, électrique ou carcérale aux résultats improbables, voire désastreux.

Cette quête de renouveau, Jean-Claude Benoit l'a menée à travers diverses approches : la relaxation de Schultz, le "rêve éveillé dirigé" de Robert Desoille, "l'expérience scénique" avec Emile Dars  ou encore, plus tardivement, l'épreuve "d'anticipation" avec Mario Berta. Enfin, la théorie systémique avec Gregory Bateson.

Ce perpétuel effort de réinvention, ces multiples expériences, il a souhaité les partager à travers de nombreux livres, publications, formations, dans le souci de développer d'autres voies plus humaines et plus efficaces, fussent-elles décalées ou originales, pour la psychiatrie.

Etre à l'écoute du patient, le reconnaître comme une personne à part entière, chercher à le libérer de sa maladie par d'autres voies que la pharmacologie en lui en donnant les moyens et en comprenant le rôle de sa pathologie dans son univers familial, lui redonner une place dans l'espace public en cherchant à désincarcérer la maladie mentale (appartements thérapeutiques...) : ces engagements, souvent à contre-courant des idées de son temps, furent l'œuvre de sa vie.

Le témoignage écrit par Claude Samberro, l’un de ses jeunes collaborateurs, et publié dans la revue Santé mentale, est représentatif de cette relation au malade qu’il a toute sa vie entretenue :

« Quand, emporté par le tourbillon de la manie, Jacques s’est levé, a accéléré le pas et asséné au psychiatre un magistral coup de pied au derrière, le jeune professionnel que j’étais alors a pris, je l’avoue, grand plaisir à la situation! Ce n’est pas si souvent qu’un médecin chef se fait « botter le cul ». Bien des années plus tard, quand j’évoque cette histoire, j’en ris encore mais… c’est la suite qui m’émeut. Tel le roseau qui plie sans se rompre, Jean-Claude Benoît*, le psychiatre, se retourna, fit face à « l’hurluberlu » et dignement lui décocha : « Merci de me faire avancer. »

J’y vois d’abord (hommage lui soit rendu) une leçon d’humilité et d’humanité. Plus d’un, sûrs de leur savoir, forts de leurs positions, n’auraient pas en des circonstances si peu flatteuses laissé une place à cet autre, patient très fou. Plus d’un n’auraient pas résisté à la tentation d’envoyer notre « énervé » en chambre d’isolement! Lui, ne le fit pas… »

Nous sommes fiers aux éditions érès d’avoir contribué à diffuser ses recherches et ses travaux. Nous remercions sa famille de nous avoir donné l’occasion de lui rendre hommage.

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