L'enfant orphelin

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L'enfant orphelin


Numéro 616 - Revue bimestrielle

Le voile noir
Dans son très beau récit autobiographique, Le voile noir1, Anny Duperey raconte qu’elle ne conserve aucun souvenir de ses parents, morts tous les deux l’année de ses huit ans. Comme si le choc les avait effacés de sa mémoire. Après le drame, elle est recueillie par sa grand-mère paternelle, qui ne lui parle jamais d’eux, et séparée de sa petite sœur, élevée par leurs grands-parents maternels. Devenue adulte, Anny adopte, pour se protéger, une légèreté virevoltante par rapport à la vie. Dans le tiroir d’une de ses commodes dorment des négatifs de son père, Lucien Legras, photographe. Un jour, elle éprouve le besoin, vital, d’écrire sur son enfance coupée en deux, et les donne à développer. Elle espère ainsi faire ressurgir les souvenirs, soulever le voile noir. Le mécanisme ne fonctionne pas, mais elle affronte enfin le chagrin, refoulé jusque-là.
Les adultes cherchent toujours à atténuer la souffrance de l’enfant orphelin et, pour l’épargner, lui parlent rarement de son parent décédé. Comme ils hésitent, parfois, à l’associer aux cérémonies du deuil. C’est une erreur. Car la souffrance de l’enfant existe, même s’il ne la manifeste pas toujours : une manière, pour lui, de la mettre à distance. L’enfant orphelin a au contraire besoin de mettre du sens sur ce deuil, et d’inscrire le parent disparu dans le récit de sa vie. S’il l’efface de sa mémoire, lui et tous les événements qui lui sont liés, comment pourra-t-il, seul combler ces lacunes ? Inévitablement, elles en entraîneront d’autres (troubles mnésiques, failles narcissiques) qui, à l’adolescence ou à l’âge adulte, pourront se transformer en conduites à risque.
La mort d’un parent est toujours un traumatisme, mais ses conséquences dépendent de l’âge de l’enfant, de la manière dont il le vit et dont il est soutenu par son entourage. La grande difficulté est que son parent endeuillé souffre lui-même, ce qui le rend souvent peu accessible. L’enfant vit, en quelque sorte, un double deuil : celui du parent disparu, et celui de l’autre, momentanément indisponible. Alors, pour ne pas « en rajouter », il se montre prévenant, se comporte comme si de rien n’était, se fait oublier, lui qui aurait tant besoin de soutien.
Accompagner l’enfant orphelin est l’affaire de tous, pas seulement du parent restant. Il faut l’inciter à exprimer sa souffrance et ses émotions (colère, sentiment de culpabilité, d’abandon) puis, l’aider à se construire avec l’image du parent absent : lui raconter des anecdotes de son passé, lui dire qui il était et ce qu’il aimait, quelle relation il avait avec lui. Laisser à sa disposition un album photos, qu’il regardera de temps à autre, quand il en aura envie. Le tout, sans s’imposer à lui. Il ne s’agit pas de faire effraction dans son travail de deuil – lequel a sa propre temporalité –, mais de se montrer disponible. L’essentiel étant d’éviter le silence, le voile noir.

1. Points Seuil, 1992.

 

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Détails
Parution : 15 septembre 2015
EAN : 9782749251097
21x28, 58 pages
L'école des parents - La revue
5/2015
Thème : Enfance & parentalité

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